En puissance : ce qui est en puissance est un potentiel, une capacité présente chez un individu avant même qu'il ait pu la mettre en œuvre, et qui est la condition pour mettre en œuvre cette capacité.
Par exemple, un aigle qui sort de son œuf est en puissance capable de voler, et quand cet aigle adulte dort et ne vole pas, il est aussi en puissance capable de voler, même s'il ne le fait pas actuellement. En revanche, par son propre corps, un être humain ne possède pas en puissance la capacité de voler propre à l'aigle et à la plupart des oiseaux.
La puissance permet de penser le passage d'un apparent non-être à l'être : quand un individu dort, même s'il n'exerce pas ses qualités, il les possède quand même. Mais une puissance ne produit d'effet et ne passe à l'existence que par le moyen de l'acte, qui est concrètement le premier à apparaître, même s'il présuppose en réalité une puissance.
En acte : un acte ne peut surgir du néant, il est nécessairement le déploiement d'une capacité préexistante en puissance.
Une puissance n'est pas n'importe quel potentiel, mais un potentiel pour une certaine capacité déterminée qui, une fois réalisée par l'acte, doit atteindre une limite, celle de sa perfection, de son épanouissement complet.
Par exemple, le gland est en puissance un être beaucoup plus considérable dans la perfection de sa puissance et son accomplissement : le chêne, qui à son tour produit d'autres glands, etc.
La conception de la nature des êtres mise en jeu par la dualité de la puissance et de l'acte est donc finaliste : elle suppose que les capacités en puissance, les dispositions ou potentiels, sont orientés vers une fin déterminée, une perfection précise.
La puissance et l'acte dans la nature
La conception de la nature dont il s'agit ici n'est donc pas mécaniste, celle de transmission de forces et de mouvements entre des êtres matériels.
Elle n'est pas non plus évolutionniste, celle d'un potentiel aléatoire (la variabilité génétique) qui par la sélection naturelle produira en acte, non pas une certaine espèce dans sa perfection prédéterminée, mais différentes espèces qui ne sont optimales que dans leur adaptation à un certain environnement.
La puissance et l'acte au niveau humain, dans la morale et la politique
L'exercice convenable de l'acte permet aussi de développer cette puissance, et en retour, de développer aussi l'excellence de cet acte, qui peut devenir ainsi, par l'exercice, de plus en plus vertueux. La puissance et l'acte ne sont pas seulement complémentaires, mais ils se renforcent l'un l'autre par un cercle vertueux.
Inversement, une puissance non développée ou mal développée par un acte incorrect devient difficile à mettre en œuvre, faible, voire vicieuse : on entre alors dans un cercle vicieux entre la puissance et l'acte, qui se corrompent l'une l'autre.
Mais tant qu'une puissance subsiste, et une capacité à agir, alors une certaine souplesse demeure dans la conduite, et le vice (au prix de grands efforts) peut se muer en vertu, comme la vertu (par un dérèglement continu) se transformer en vice.
Il importe donc que l'être humain développe sa puissance de bien agir, non seulement par l'exercice de son potentiel naturel, mais en suivant la règle droite par laquelle la raison a saisi quelle doit être la perfection en acte de ce potentiel, de cet être en puissance.
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